Menu
Cliquez sur la bande titre pour revenir sur le menu

Si vous avez des documents écrits ou photographiques pouvant corriger ou compléter les données de cette page, veuillez contacter l'auteur du site

Adj Roger Thuau

Adj Roger Thuau en 1915 - Brevet de pilote militaire n° 1402 obtenu à l'école d'aviation militaire d'Etampes, le 21 août 1915 - Pilote de l'escadrille MF 62 / N 62 du 12 septembre 1915 au 10 octobre 1916 - Photo Roger Thuau transmise par M. Jean-Yves Justeau, son neveu, que je remercie pour son aide.

Adj Roger Jean Thuau - Né le 1er juin 1895 à Enghien - Fils de Victor Thuau et de Marie Howwellette - Domiciliés 9 boulevard d'Engheim, à Enghien - Profession avant guerre Etudiant - Mobilisé au 2ème groupe d'aviation, dépot de Lyon-Bron, le 20 décembre 1914 - Brevet de pilote militaire n° 1402 obtenu à l'école d'aviation militaire d'Etampes, le 21 août 1915.

Pilote de l'escadrille MF 62 / N 62 :

Pilote de l'escadrille MF 62 / N 62 du 12 septembre 1915 au 10 octobre 1916 - Il fait partie des pilotes affectés à l'escadrille MF 62 lors de sa création - Nommé Sergent, le 28 décembre 1915 - Le 2 avril 1916, le Sgt Roger Thuau a déjà plus de 100 heures de vol en territoire ennemi, s'est spécialisé sur les missions de reconnaissance en basse altitude - Le 8 mai 1916, le Nieuport 12 n° 465 est affecté au Sgt Thuau.

Extrait de l'ordre n° 327 portant Citation à l'ordre de l'armée du Sgt Roger Thuau, pilote de l'escadrille MF 62 : "Pilote plein d'entrain et de dévouement. Cent heures de vol au-dessus des lignes ennemies. A exécuté de nombreuses opérations de bombardement et de photographie à faible altitude, malgré la canonnade la plus violente et de fréquentes atteintes de son avion. Le 2 avril 1916, a ramené, à la suite d'une importante mission exécutée à 1400 mètres au-dessus de l'ennemi, son observateur blessé au visage par un éclat d'obus." Au Grand Quartier Général, le 19 avril 1916 - Général Fayolle, commandant la 6ème armée.

Le 10 octobre 1916, accroché par quatre avions ennemis, l'équipage Adj Roger Thuau (N 62) / Ltt Jean Billon (obs C43) disparait en mission, à bord du Nieuport 12 bis n° 1596, dans la région de Villers-Carbonnel (80) - L'Adj Thuau est fait prisonnier - Grièvement blessé, il a posé son avion en catastrophe dans les lignes allemandes - L'observateur, le Ltt Billon a été tué lors de l'attaque des chasseurs adverses - En treize mois de présence, l'Adj Thuau avait réalisé environ 170 heures de vol de guerre au-dessus du territoire tenu par l'ennemi - Leur adversaire était vraisemblablement le Ltn Wilhelm Frankl du Jasta 4 (sa 14ème victoire)

Rapport de l'Adj Roger Thuau sur son combat aérien du 10 octobre 1916 :

Le 10 au matin avec le Ltt Billon comme observateur, nous avions été chargé d'une mission importante sur les lignes allemandes; le temps très peu favorable ne nous permit de partir que vers 11 heures. Nous avons pris notre altitude entre l'escadrille et Amiens. Après environ 1h15 de vol, voyant qu'il était impossible de monter plus haut, je suis venu tourner, comme il était convenu au-dessus de l'escadrille; altitude 3.200 m. Là, le lieutenant Billon a lancé des signaux pour rassembler nos camarades, et moi ayant vu seulement 4 ou 5 avions de notre reconnaissance, j'ai demandé à mon observateur : " Que dois-je faire ? " Il me répondit " Faites encore un ou deux tours au-dessus de l'escadrille et nous passerons les lignes. "
Pendant que j'exécutais cet ordre le lieutenant Billon lançait encore des signaux et quoique tous les autres avions n'étaient pas autour de nous, nous décidâmes de franchir les lignes. Nous avons dû passer les tranchées vers Biaches-Barleux à peine à quelques kilomètres dans les lignes, nous avons rencontré un avion de la N 62 qui m'a semblé être un 30 m2. Comme nous nous croyions escortés par plusieurs camarades et de plus ayant rencontré ce dernier avion, j'avais entière confiance; nous volions vent arrière dans la direction de Roisel; altitude 3.200 mètres.
A peine y avait-il 1 minute ou deux que nous avions rencontré le 30 m2 que le lieutenant Billon se levant de son siège, me cria " Mais ce sont des boches. " Je me retournai aussitôt et je vis 3 petits avions de couleur crême, par leur forme rappelant beaucoup le SPAD qui marchant perpendiculairement à nous, se trouvaient à une distance de 80 m au plus et au moins 100 mètres plus haut que nous. Le lieutenant Billon, debout dans le fuselage ouvrit immédiatement le feu sur nos adversaires qui, se séparant, firent pleuvoir sur nous une grêle de balles; c'est à ce moment qu'une balle vient se loger dans mon pied gauche.
Comme je pilotais, la tête tournée du côté de mon observateur, attentif à son moindre commandement et geste, je vis le lieutenant Billon porter ses mains à sa figure, faire un 1/4 de tour sur lui-même et s'écrouler dans le fuselage, sans dire un mot; il était tué !

Pendant cette première phase du combat, je ne sais pas dans quelle direction j'ai volé, car j'ai surtout fait mon possible pour mettre le lieutenant Billon dans la position la plus favorable pour atteindre nos adversaires. Mon observateur mort, moi blessé et mon appareil atteint par de nombreuses balles, j'ai cherché à regagner le plus rapidement possible les lignes françaises; j'ai donc mis mon moteur à pleins gaz et utilisant toutes les acrobaties que je savais faire, je me suis dirigé vers Péronne. Rencontrant un gros nuage sur ma route, je m'y suis caché espèrant que mes adversaires me perdraient; malheureusement, en sortant de ce nuage, les Allemands qui me serraient de très près, me mitraillèrent de plus belle. Je me souviens faisant une volte-face rapide, avoir achevé de tirer ma bande de mitrailleuse avant sur celui de mes ennemis qui était le plus proche; malheureusement une balle vint me brise l'épaule droite. Recevant ce projectile, j'ai éprouvé une très vive douleur et j'ai perdu connaissance; je ne sais à quelle altitude, je me trouvais à ce moment. Je suis revenu à moi quelques minutes plus tard alors que mon appareil volait dans je ne sais quelle direction; mon bras me refusant tout service, instinctivement j'ai repris le manche à balai dans la main gauche et mettant les commandes au milieu, mon moteur tirant encore, mon appareil reprit sa ligne de vol vers l'Ouest et les lignes françaises.

Je me souviens être passé à très faible altitude au-dessus d'un village qui m'a semblé tout noir et en ruines; l'essence coulait abondamment sur mes pieds, mon moteur avait de nombreux ratés et les aviateurs ennemis me mitraillaient toujours. C'est à ce moment que je me suis vu voler pour la dernière fois que j'ai vu mon appareil; de gros morceaux de toile flottaient derrière mes ailes et dans la cellule droite un des gros câbles était coupé. Ne voulant naturellement à aucun prix tomber entre les mains des Allemands et ne pouvant plus diriger à la carte, je volais plein Ouest en me servant de ma boussole; les aviateurs allemands me mitraillaient plus que jamais,altitude environ 25 mètres. Ensuite, je ne sais plus ce qui s'est passé car j'ai complétement perdu connaissance. Je suppose que mon moteur ne tirant plus, je me suis approché insensiblement du sol et suis entré violemment en contact avec la terre.

Le Nieuport 12 bis n° 1596 baptisé "Toc-Toc" de l'équipage composé de l'Adj Roger Thuau (N 62) et du Ltt Jean Billon (obs C 43) de l'escadrille N 62 a été capturé dans les environs de Villers-Carbonnel (80), le 10 octobre 1916 - Le pilote a été blessé de deux balles au pied gauche et à l'épaule droite et l'observateur tué d'une balle à la tête - Au moment où cette photo a été prise, le pilote a été évacué pour recevoir des soins et l'observateur, sorti de la carlingue par les Allemands, git dans l'herbe - Son corps est marqué d'une croix - Notez les marquages de cet appareil, entoilage argenté, le coq de la pièce de 20 fr or dans sa variante multicolore, le nom de baptéme "Toc-Toc" et la casserole d'hélice - Le numéro d'identification est soit le "3" ou le "7" - Il ne s'agit donc pas de l'appareil normalement affecté à l'Adj Thuau - Cliquez sur l'image pour l'agrandir - Photo collection Albin Denis.

Quand je suis revenu à moi, j'étais étendu sur le sol, des soldats allemands autour de moi et l'un d'eux qui avait un fusil, me tenant en joue, me demande brutalement si j'étais anglais. Je me suis retrouvé dans un poste de secours aux tranchées, presque complétement déshabillé, un grand pansement autour de la poitrine et de l'épaule et un autre au pied. Mes premières paroles furent pour demander ce qu'était devenu le lieutenant Billon et ou j'étais; l'on me répondit que j'étais; l'on me répondit que j'étais près de Villers-Carbonnel et c'est seulement longtemps après qu'un médecin vint me dire : " Monsieur, votre camarade est tué."

Pendant ce combat, je n'ai donc vu que 3 avions allemands, beaucoup plus rapides et plus maniables que mon appareil. J'ai été terriblement gêné par le vent contraire et par les nuages; je me croyais escorté alors que je ne l'étais pas. Malheureusement, j'ai perdu connaissance quelques instants trop tôt et, comme j'ai été continuellement sous le feu de mes ennemis sans presque pouvoir riposter, je ne dois ma vie qu'à mes acrobaties. Trois ou quatre jours après que j'avais été abattu, alors que je me trouvais à l'ambulance de Vermand, je ne fus pas peu surpris de voir trois aviateurs allemands, debout et casquette à la main, au pied de mon lit, qui venaient prendre de mes nouvelles; parmi eux se trouvaient le lieutenant Wilhelm Frankl, chef d'escadrille, dont j'étais la 14ème victoire. Il m'exprima ses félicitations d'avoir lutté si longtemps un contre trois; me disant qu'il regrettait la mort du lieutenant Billon, et se retirant, il laissa sur une table près de mon lit, son portrait avec ces quelques mots signés de sa main : "A mon brave adversaire, en souvenir du combat du 10 octobre 1916."

Citations à l'ordre de la VIème armée :

L'équipage français a été cité pour ce fait d'armes.

* Citation à l'ordre de la VIème armée, à titre posthume, du Ltt Jean Léopold Billon du 42ème régiment d'artillerie, observateur à l'escadrille C 43, en date du 7 décembre 1916 : "Officier d'une bravoure exemplaire. S'est signalé au cours des opérations sur la Somme en exécutant de nombreuses reconnaissances photographiques éloignées au cours desquelles il a toujours montré un allant et un sang-froid remarquables. Disparu, le 10 octobre 1916, au cours d'une mission."

* Citation à l'ordre de la VIème armée de l'Adj Roger Jean Thuau, pilote à l'escadrille N 62, en date du 21 décembre 1916 : "Excellent pilote, engagé volontaire, s'est dépensé sans compter pendant treize mois, exécutant environ deux cents heures de vol au-dessus de l'ennemi. A été grièvement blessé au cours d'un combat, le 10 octobre 1916."

Ltt Jean Delphin Léopold Billon, observateur de l'escadrille C 43 - Né le 27 octobre 1891 à St-Hyppolyte-du-Fort (Gard) - Issu du 42ème régiment d'artillerie, il a été affecté à la C 43 en provenance de la N 62, le 24 juin 1916 - Nommé Lieutenant, le 4 avril 1916, il a été tué au cours d'une mission photo, le 10 octobre 1916, sur Villers-Carbonel - Il volait en compagnie du Sgt Roger Thuau de la N 62 - Thuau, blessé, pose le Nieuport 12 bis n° 1596 dans les lignes allemandes et est fait prisonnier - Photo Paul Cottave-Claudet transmise par son petit-fils Jean-Paul Milliand que je remercie pour son aide.

Moniteur à l'école d'aviation militaire d'Avord :

Après 18 mois de captivité, il est rapatrié comme grand blessé - Ayant demandé de retourner au front, il ne pu le faire en raison des conventions de Berne qui stipulait qu'un blessé libéré ne pouvait reprendre le combat, il fut affecté comme moniteur à la division Sopwith de l'école d'aviation militaire d'Avord - A la fin de la guerre, il est titulaire de la Médaille Militaire, de la Croix de Guerre 14-18 et trois citations à l'ordre de l'armée.

Libéré par les Allemands après 18 mois de captivité comme grand blessé, l'Adj Roger Thuau ne peux plus revenir au front en raison des conventions de Berne - Il est alors affecté comme moniteur à la division Sopwith de l'école d'aviation d'Avord - Il est photographié devant un Sopwith 1A2 à moteur Clerget de 130 HP de l'école en 1918 - Photo Roger Thuau transmise par M. Jean-Yves Justeau, son neveu, que je remercie pour son aide.

Sopwith 1A2 de la division Sopwith de l'école de pilotage d'Avord en 1918 - Carte postale d'époque.

A la fin janvier - février 1919, lors d'un trajet Etampes - Avord effectué sous des chutes de neige, le moteur du Breguet XIV A2 que pilotait l'Adj Thuau s'arrête net - Volant encore à 50 mètres d'altitude, le pilote est contraint d'effectuer un atterrissage forcé qui se termine en crash dans les environs de la Motte-Beuvron (Sologne) - Thuau et le mécanicien Varon qui l'accompagnait, sont légèrement blessés - Photo Roger Thuau transmise par M. Jean-Yves Justeau, son neveu, que je remercie pour son aide.

Compagnie Franco-Roumaine de Navigation Aérienne :

Démobilisé, il devient pilote de ligne de la Compagnie Franco-Roumaine de Navigation Aérienne puis de la Compagnie internationale de Navigation Aérienne (CIDNA) - Chef pilote et moniteur PSV (pilotage sans visibilité) - A assuré le service de la ligne Paris - Constantinople - Angora - A assuré le convoyage d'avions jusqu'en Indochine.

* Chevalier de la Légion d'Honneur de Roger Jean Thuau, pilote aviateur, en date du 19 août 1925 : "15 ans 6 mois de services militaires et de pratique professionnelle. S'est distingué aux armées, dans l'aviation militaire, dès le début de la guerre, méritant, par sa belle conduite et par une blessure grave reçue au cours d'une mission périlleuses, deux citations, Croix de Guerre, Médaille Militaire. Comme pilote civil, est un modèle de dévouement et un exemple d'habileté et de calme. Grâce à une énergie jamais en défaut, contribue à assurer le service de la ligne Paris-Constantinople-Angora. Compte environ 3.000 heures de vol."

Dans la réserve, affecté au 3ème régiment d'aviation de chasse de Châteauroux.

Ligne Prague - Vienne - Budapest de la Compagnie Franco-Roumaine de Navigation Aérienne - Photo prise sur le terrain de Vienne-Aspern (Autriche) en 1922 - Au poste de pilotage, le pilote Roger Thuau, n° 2, le pilote Jacques Richard, n° 3 Marcel Libert, chef de service technique, n° 4 Martel chef mécanicien au capot du moteur, Gay mécanicien français, plusieurs passagers et le personnel autrichien de l'aéroport - Cliquez sur l'image pour l'agrandir - Photo Roger Thuau transmise par M. Jean-Yves Justeau, son neveu, que je remercie pour son aide.

CIDNA (Compagnie internationale de navigation aérienne)

Roger Thuau est sur le point de partir de l'aéroport de Budapest pour Belgrade-Pancevo et Bucarest-Banéasa - CIDNA (Compagnie internationale de navigation aérienne) en juillet 1923 - Photo Roger Thuau transmise par M. Jean-Yves Justeau, son neveu, que je remercie pour son aide.

Nommé Lieutenant de réserve, le 16 décembre 1931.

En 1939, il totalise 8370 heures de vol.

Roger Thuau en 1940 - Photo Roger Thuau transmise par M. Jean-Yves Justeau, son neveu, que je remercie pour son aide.

 

Remerciements :

- M. Jean-Yves Justeau pour l'envoi des archives de l'Adj Roger Thuau, son oncle.

Bibliographie :

- Les escadrilles de l'aéronautique militaire française - Symbolique et histoire - 1912-1920 - Ouvrage collectif publié par le SHAA de Vincennes en 2003.
- L'aviation française 1914-1940, ses escadrilles, ses insignes - par le Commandant E Moreau-Bérillon - publié à compte d'auteur en 1970.
- The French Air Service War Chronology 1914-1918 par Frank W.Bailey et Christophe Cony publié par les éditions Grub Street en 2001.
- Les Armées françaises dans la Grande Guerre publié à partir de 1922 par le Ministère de la Guerre.
- Les "As" français de la Grande Guerre en deux tomes par Daniel Porret publié par le SHAA en 1983.
- Site Internet "Mémoires des hommes" du Ministère de la Défense - Voir le lien

 

Si vous avez des documents écrits ou photographiques pouvant compléter les données de cette page, veuillez contacter l'auteur du site

Nicolas Bouisson Charles Chanaron

 

 

pas de fiche > 1918

Cliquez sur l'image Cliquez sur l'image Cliquez sur l'image Cliquez sur l'image pour l'agrandir Cliquez sur l'image pour l'agrandir