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Sol Marcel Vicaire

Marcel Marie Emile Vicaire est né le 29 septembre 1893 dans le 16ème arrondissement de Paris (75). Il est le fils d'Ernest Marie Georges Vicaire, un homme de lettres et de Jeanne Marie Elizabeth Gras qui étaient domiciliés villa "Scheffer" située au 51, rue Scheffer à Paris (75). Ils emménagerons ensuite rue du Conétable à Chantilly (Oise). Son père a été le premier conservateur de la collection Charles de Spoelberch de Lovenjoul conservée dans l'hôtel du même nom à Chantilly.

Copie de l'acte de naissance n° 1151 du registe de la mairie du 16ème arrondissement de Paris - Cliquez sur l'image pour l'agrandir - Photo archives départementales du Rhône.

La villa "Scheffer", où habitaient les parents de Marcel Vicaire, est située au 51, rue Scheffer à Paris 16ème (75) - Photo Google Map.

Appelé pour le service militaire :

Appartenant à la classe de mobilisation 1913, c'est le bureau de Compiègne (Oise) qui a assuré son recensement sous le matricule n° 1668. Il est appelé pour faire son service militaire dans l'aérostation en 1913. Très vite, il est déclaré exempté définitif de service pour coxalgie de la jambe droite (ostéoarthrite tuberculeuse de la hanche) et renvoyé à sa vie civile. Malgré la déclaration de guerre, la décision de réforme est maintenue par la commission de réforme d'Ille-et-Vilaine, le 5 octobre 1914.

Engagé volontaire pour la durée de la guerre :

Ne pouvant être mobilisé, il contacte un engagement volontaire pour la durée de la guerre, au titre de l'aérostation, le 29 septembre 1915. Lors d'un engagement volontaire, les barrières médicales tombent, il va pouvoir servir son pays malgré son handicap. Il est nommé Sapeur de 2ème classe, le 30 septembre 1915 et affecté initialement à la 24ème escouade de la compagnie de dépôt du 1er groupe d'aérostation de St-Cyr du 30 septembre au 7 octobre 1915.

Le 8 octobre, il est affecté au bureau météorologique de la RGA au Bourget : "J'ai retrouvé une foule de camarades des Beaux-Arts Je suis très bien installé dans une chambre avec un adjudant et un cabot... Le service a l'air interessant, je vais tâcher de monter un de ces jours en aéro, quoique cela ne soit pas nécessaire au service."

Section météorologique n° 6 de la RGAé :

Après une formation spécialisée, il est ensuite détaché à la section météorologique n° 6 stationnée sur le terrain d'aviation de Souilly du 7 octobre 1915 au 10 mars 1916.

* Une lettre envoyée le 15 mars 1916 : "Nous sommes toujours très occupés par notre installation nous commençons toutefois à respirer un peu. Nous avons eu le temps hier de nous fabriquer des lits et des chaises car tout manque. Nous avons une chambre pour cinq ce qui est charmant. Le mobilier n'est pas des plus confortable mais largement suffisant. L'ordinaire est bon, l'eau seule est mauvaise. La soupe est loin d'ici à 1 km environ mais la trotte sert d'apéritif."

* Lettre envoyée, le 18 mars 1916 : "Je t'écris au crayon car il n'y a qu'un stylo pour 11 et les encriers sont inconnus chez nous. Ne pourriez-vous me faire un sac à matelas de 80ccm sur 2cm et me l'envoyer cela me serait très utile car pour le moment nous n'avons que de la paille installée sur nos lits que nous avons fabriqués. Nous augmentons chaque jour notre mobilier, c'est une occupation lorsque nous n'avons rien d'autre à faire."

* Lettre envoyée, le 24 mars 1916 : "Ces derniers jours, je n'ai pu vous écrire étant tout ce qu'il y a de plus occupé; nous nous levons à 5h et finissons vers les 11h avec juste le temps de déjeûner et de dîner, inutile de te dire qu'après cela les nuits sont bonnes, je me porte à merveille ce régime ne me fatigue pas du tout, c'est une habitude à prendre. Nous sommes maintenant en popote, ce qui est plus agréable. Nous allons le matin à la distribution et nous arrangeons pour faire faire notre cuisine.... ce que nous touchons pour les repas est bien mais pas excessif comme quantités, nous ne mourrons pas de faim pour cela, nous trouvons à acheter quelques conserves."

Personnels de la section méréorologique n° 6 de la RGAé en place sur le terrain d'aviation de Souilly (Meuse) entre le 1er et le 17 octobre 1916 - La date de cette photo a été déduite grâce à l'étude des temps de présence des militaires visibles sur cette photo - Cliquez sur l'image pour l'agrandir - Photo Marcel Vicaire transmise par Isabelle Crouïgneau-Vicaire, sa fille, que je remercie pour son aide.

De gauche à droite : Adj Auguste Anthelme Dufourd - Sol Emile Auguste Compère - Sol Joseph Bigot - Sol Annet Barge - Sol Christian Hustinx - Pharmacien aide-major de 1ère classe Maurice Pierre Vigier - Slt Charles Chemineau - Sol René Le Turcq - Cal Eugène Emile Borie - Sgt Joseph Lussigny - Sol Marcel Vicaire - Sol Eugène Pierre Magnan.

La section météorologique n° 6 de Souilly à l'entrainement - De gauche à droit : Ltt Pierre Vigier (cdmt de la section) - Adj Auguste Dufourd - X - Ltt Charles Chemineau - X - Sol Annet Barge - X - X - X - Sgt Joseph Lussigny - Sol Christian Hustinx - Sgt Eugène Borie - Cliquez sur l'image pour l'agrandir - Photo Marcel Vicaire transmise par Isabelle Crouïgneau-Vicaire, sa fille que je remercie pour son aide.

Sol Marcel Vicaire au service du théodolite de sondage aérologique Morin à Souilly (Meuse) - Cet équipement spécialisé permet de suivre et de relever les différentes positions du petit ballon gonflé à l'hydrogène que l'on peut observer à gauche tenu par le Sol Eugène Magnan - Grâce à ces mesures, on peut calculer la vitesse et la direction du vent à différentes altitudes, en suivant l'ascension du ballon - Le soldat dans le fauteuil porte un anémomètre primaire - Photo Marcel Vicaire transmise par Isabelle Crouïgneau-Vicaire, sa fille que je remercie pour son aide.

Théodolite de sondage aérologique Morin de type militaire datant de 1917 - Le théodolite permet de suivre et de relever les différentes positions d'un petit ballon gonflé à l'hydrogène - Grâce à ces mesures, on peut calculer la vitesse et la direction du vent à différentes altitudes, en suivant l'ascension du ballon - Ce type d'équipement a largement été utilisés par l'aérostation, l'aéronautique militaire et l'artillerie pour régler les tirs des canons à longue portée - Photo Météo France du site internet de Météo France.

Gonflage d'un ballon sonde par le personnel de la section météorologique n° 6 de Souillt (Meuse) - Il a été inventé par Gustave Hermite en 1892 - Il est utilisé pour faire des mesures locales dans l'atmosphère comme la température, la pression et l'humidité - Les instruments embarqués doivent être récupérés, après l'explosion du ballon, pour être exploités - Photo Marcel Vicaire transmise par Isabelle Crouïgneau-Vicaire, sa fille que je remercie pour son aide.

Montage d'un anémomètre à moulinet par le personnel de la section météorologique n° 6 de Souilly (Meuse) - Derrière, on aperçoit l'église Saint-Martin du village de Souilly - Photo Marcel Vicaire transmise par Isabelle Crouïgneau-Vicaire, sa fille que je remercie pour son aide.

Assis au bord du lit, le soldat Marcel Vicaire en compagnie du Sol Annet Barge - L'équipement du soldat de l'aéronautique militaire, versé à la section météorologique n° 6 de Souilly, rassemblé sur un mur, avec un mousqueton de cavalerie en dotation individuelle, musette, gourde, veste et manteau - Le lit, fait en planches, est garni de paille, pas vraiment confortable mais c'est quand même mieux que les abris de tranchées - Photo Marcel Vicaire transmise par Isabelle Crouïgneau-Vicaire, sa fille que je remercie pour son aide.

En subsistance à l'escadrille MF 63 / F 63 :

La section n° 6, en place sur le terrain d'aviation de Souilly (Meuse), est prise en subsistance (nourris et logés) au sein de l'escadrille MF 63 / F 63.

La section météorologique n° 6 de Souilly était une petite unité qui ne pouvait être autonome au niveau des vivres et du logement. Ses personnels étaient donc pris en subsistance par les unités d'aviation ou d'aérostation présentes sur le terrain de Souilly. Cette unité fournissait des prévisions météo à toutes les unités d'aviation présentes dans le secteur de Verdun, ainsi qu'aux compagnies d'aérostiers du front.

Marcel Vicaire restera en subsistance à la MF 63 / F 63 du 11 mars au 21 septembre 1916. A son arrivée, l'escadrille vole sur MF 11 bis et F 40. Elle est rattachée à l'aéronautique de la région fortifiée de Verdun. Elle est commandée par le Cne Henri de Bancalis de Maurel d'Aragon, qui a pris son commandement, le 22 février 1916. Cet officier est tué au combat, le 12 mars 1916.

* Lettre envoyée à ses parents, le 20 mai 1916 : "Je viens d'apprendre une nouvelle qui me fait beaucoup de peine, ce pauvre Viraud a été tué , c'était un excellent garçon et nous nous voyons plus fréquemment ces derniers temps, il a reçu deux balles en pleine poitrine et n'a pas dû souffrir. Je devais monter avec lui à son retour. Je l'attendais quand on m'a annoncé cette nouvelle. Je crois que je vais être chargé de rapporter ses affaires personnelles à ses parents. Ce n'est pas une mission agréable, j'aurais dans ce cas ma permision pour Paris et Chantilly."

* Une autre lettre envoyée, le lendemain : "J'ai pu aller hier à l'enterrement de ce pauvre Viraud et de son observateur, depuis quelques temps, je le voyais plus souvent, c'était un excellent garçon. Je vais écrire par ce même courrier à sa mère en attendant d'aller leur porter ses souvenirs, c'est une bien pénible mission que j'ai à faire."

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Cliquez sur ce lien pour consulter la page consacrée
à la section météorologique n° 6 de Souilly

Le 26 mai 1916, le Cne Antoine Césari prend le commandement de l'escadrille et le laisse pour partir en Orient, au profit du Cne Pierre Bourdeau de Lajudie, le 31 mai 1916. Cet officier sera tué par des éclats de bombe lors du bombardement du terrain d'aviation de Vadelaincourt, le 20 juin 1916. Le 24 juin 1916, le Cne Henri Jauneaud prend la suite.

* Lettre du 2 juillet 1916 : "Vous trouvez mes lettres bien brèves, mais comme vous savez que l'on ne peut rien dire, or comme je vais toujours très bien, je ne puis vous donner d'autres nouvelles. Il y a une quinzaine de jours, nous avons subi un violent bombardement, aucun de nous n'a été touché, mais nous l'avons échappé belle, heureusement j'ai eu la présence d'esprit de me coucher en entendant le sifflement des obus, puis j'ai pu me glisser jusque dans un trou où j'étais bien abrité...surtout, ne vous inquiétez pas pour cela nous avons d'excellents abris, d'ailleurs c'est la guerre et il fallait un peu cela pour nous le rappeler."

* Lettre du 2 août 1916 : "Nous commençons à souhaiter bien vivement la pluie, ce temps est insupportable (29° à l'ombre) et dans les baraques en bois, heureusement nos abris creusés dans la terre sont frais et lorsque nous avons un instant nous allons y lire le journal cependant, ce n'est pas la chaleur qui nous y attire parfois c'est la prudence qui nous y envoie."

* Lettre du 17 septembre 1916 : "Nous commençons à sentir le froid et j'ai l'intention de vous demander d'envoyer ma peau de bique."

* Lettre du 6 octobre 1916 : "Nous avons un temps affreux, et pour quelques jours encore je crois. Quant à la boue nous commençons à nous y habituer, à certains endroits on enfonce à mi-jambes."

Le 21 septembre, le Sgt Lussigny et le Sol Vicaire sont affectés au service météorologique de la 2ème armée. Le jour de son départ, la MF 63 fait mouvement sur le terrain d'aviation de Toul (Meurthe-et-Moselle).

En subsistance à l'escadrille N 23 :

Le 21 septembre 1916, l'escadrille MF 63 ayant fait mouvement sur Toul (Meurthe-et-Moselle), le personnel de la 6ème section météorologique est mis en subsistance au sein de l'escadrille N 23 déployée à Vadelaincourt (Meuse). Marcel Vicaire y restera du 21 septembre 1916 au 21 février 1917.

A son arrivée, la N 23 est stationnée sur le terrain d'aviation de Vadelaincourt (Meuse) et rattachée à l'aéronautique de la 4ème armée. Elle est sous les ordres du Cne Louis Robert-de-Beauchamp et est équipée de neuf Nieuport 11, 16, 17 et trois Sopwith 1A2.

* Lettre du 6 octobre 1916 : "Il y a ici un peu de nouveau, mon camarade Leturcq va probablement nous quitter, pour aller former un nouveau poste avec le Lieutenant Chemineau, je pense que je resterai ici. Je regrette beaucoup ce changement , c'est mon meilleur camarade qui s'en va. Notre nouveau lieutenant est très gentil, et paraît très agréable, mais l'autre était un ami."

En novembre 1916, la N 23 passe à l'aéronautique de la 2ème armée. Elle est engagée de la 2ème phase de la bataille de Verdun avec l'attaque française sur la rive droite de la Meuse et la conquête de l'ouvrage de Bezonvaux, du bois de la Chaume, de Louvemont et de la côte du Poivre.

Le 6 décembre 1916, la N 23 fait mouvement sur le terrain de Souilly (Meuse) où elle restera jusqu'à la fin janvier 1919. Le 17 décembre 1916, le Cne Pierre de Langle de Cary prend le commandement de l'escadrille N 23.

* Lettre à sa mère, le 17 décembre 1916 : "Ma chère mère, je n'ai pu vous écrire plus tôt étant débordé de travail, nous avons passé plusieurs jours sans nous coucher, maintenant nous avons plus de temps, ce qui ne veut pas dire beaucoup; c'est un véritable succès qu'ont remporté nos troupes devant Verdun, à en juger par le nombre de prisonniers et de matériel pris. Je suis allé en liaison il y a quelques jours, et pense recommencer bientôt, c'est une façon économique de voir du pays. Je compte pouvoir vous écrire plus longuement demain ou après demain, car j'ai encore à faire."

* Une grande lettre, le 26 décembre 1916 : "Je profite d'un petit instant pour vous envoyer ce mot, le calme revient petit à petit, ce n'est pas un mal car nous commençions tous à être un peu surmenés. Nous avons maintenant de nouveaux camarades, agrégés de maths, trois d'entre eux sont prêtres et semblent charmants. Nous avons eu une messe de minuit suivie d'un réveillon auquel il ne manquait que les huitres, espérons que c'est le dernier pendant la guerre. Les évènements semblent se précipiter un peu plus en ce moment, les boches sont paraît-il épuisés ? Voilà déjà longtemps qu'on nous le dit, cependant cette fois-ci, certains indices nous le prouvent, c'est le moment de se cramponner. En ce moment, je fais le métier de dessinateur, ce qui n'est pas très amusant car c'est du dessin mathématique, un peu monotone, mais je suis seul à savoir tenir à peu près un crayon, heureusement j'ai à circuler de temps en temps en auto. J'ai l'impression que la fin de la guerre arrive rapidement. Je sais par des réfugiés de Valenciennes, Lille et Laon que la faim commence à se faire sentir sérieusement en Bochie, des soldats boches achètent fort cher, et non sans peine, des vivres envoyées par les soins du gouvernement américain, aux civils des régions envahies, pour les faire parvenir chez eux, ceci est interessant et une foule de choses confirme ce renseignement.Un camarade qui a passé sa permission en Suisse, nous dit que la vie est excéssivement chère en Autriche. A ceci on peut ajouter que les Boches sont enchantés d'être prisonniers car ils mangent mieux que chez eux. La situation financière est paraît-il également critique attendons la fin du mois...peut-être aurons-nous du nouveau. Pourriez-vous m'envoyer une cravate en coutil blanc car la mienne est déchirée, et joindre au paquet un foulard et quelques boules, le lieutenant Vigier est épaté par la prestidigitation."

* Lettre du 15 janvier 1917 : "J'ai reçu ce matin la lettre de papa vous devez être tout à fait tranquilisés maintenant par ma dernière lettre, je vais tout à fait bien. Je ne crois pas comme je le pensais remonter en avion, mais je vais avoir en échange un poste épatant, non sans peine, je pars très probablement avec un de mes amis former un poste dans une compagnie d'aérostiers. Ce départ est je pense pour la semaine prochaine et je serai toujours dans la même région, toujours commandé par le même lieutenant, dès que je serais définitivement fixé, je vous écrirai."

* Lettre du 23 janvier 1917 : "Mon départ est un peu retardé. Mes fonctions seront toujours les mêmes mais beaucoup plus près des lignes, il est probable que je ferai quelques exercices en saucisse, ce qui n'est pas désagréable. Depuis quelques jours, nous avons un froid intense; cette nuit nous avons eu 12 au-dessous de 0° et dans ma chambre l'eau, le thé, les chaussures étaient gélés, les serviettes de toilette se tiennent comme des cierges. Je suis enchanté d'avoir ma fourrure, surtout lorsque j'ai, comme ces derniers jours à circuler en auto."

* Lettre du 2 février 1917 : "Mon départ en poste est encore retardé de quelques jours. Je vous écrirai lorsqu'il faudra m'adresser mes lettres à la compagnie d'aérostier. Il fait si froid que j'ai peine à tenir ma plume. Cette nuit nous avons eu -20° et en ce moment dans la pièce où je suis il y a -6° c'est vraiment peu, mais ce froid se supporte car il n'est pas humide..Je crois que ma tante va m'avoir le chien que je désirais."

En subsistance à la 38ème compagnie d'aérostiers :

Le Sgt Lussigny et Marcel Vicaire sont mis en subsistance à la 38ème compagnie d'aérostiers du 21 février au 13 mai 1917. A son arrivée, la compagnie bivouaquait au camp Fourgons, à 1 km au nord-est d'Auzéville-en-Argonne (Meuse), près du bois St-Vincent. Elle est sous le commandement du Cne Maurice Simon depuis 18 février 1917 qui arrivait de la 36ème compagnie d'aérostiers.

* Lettre du 21 février 1917 : "Je suis enfin arrivé à mon nouveau poste voici mon adresse : Poste aérologique. 38° compagnie d'Aérostiers. Secteur 46. Pour le moment, j'ai beaucoup à faire, j'améliore un peu mon domicile, heureusement il ne fait pas trop froid en revanche nous avons une boue effroyable. Les chiens sont très gentils, l'un Flic (anciennement Dick) est excellent ratier, il chasse toute la journée, très affectueux obéissant et vif, l'autre Follette toute blanche, un oeil blanc, l'autre poché semble d'une intelligence extraordinaire, également vivace et caressante, tous deux me connaissent déjà très bien... Mon organisation est à peu près terminée, mon mobilier se compose d'un lit, d'une chaise, une table toilette avec réservoir d'eau; une de mes cantines sert d'armoire l'autre de siège; à côté de mon lit porte manteau et tout le bazar réglementaire, ma pétoire, casque, cartouchière en panoplie, bref mon installation est confortable, je me suis installé mon téléphone au-dessus de mon plumard afin de pouvoir parler de mon lit. Les clebs couchent auprès de moi dans une caisse de paille, ils sautent sur mon lit le matin, je suis enchanté de les avoir ils tiennent bien compagnie. Pour le moment je suis seul avec mon sergent [Lussigny] de sorte que nous avons un peu plus de travail, mais je ne m'en plains pas, nous sommes bien plus tranquilles; n'étant que deux, les cuisiniers nous soignent bien, mais les repas sont à des heures impossibles. Jus à 5h 30. déjeuner à 9h30 (viande et légumes) à 15h 30 soupe-viande et légumes-dessert-café ! À 16h thé ! Il y a à la compagnie une coopérative où l'on trouve pas mal de choses, mais tout est bon marché et pas toujours de bonne qualité, mais nous arrivons à nous ravitailler par d'autres moyens. Voici ce qui me semble une longue lettre, ce qui va vous épater, mais vous ne le serez certainement pas autant que moi, il y a bien longtemps que je n'ai noirci quatre pages de papier."

* Lettre du 10 mars 1917 : "Je voulais vous écrire hier, mais j'ai été obligé d'écrire au commandant de l'aéronautique pour régulariser ma situation militaire : il vient de paraître une note concernant les engagés spéciaux, cette note dit que : les engagés spéciaux qui seront maintenus exemptés ou réformés, pourront faire, dans les 30 jours suivant la visite, une demande pour rentrer chez eux, Mais tu penses bien que je ne marche pas. Ceux qui au contraire seront classés aptes en service armé ou auxiliaire seront renvoyés chez eux immédiatement jusqu'au moment de leur réincorporation. Lorsqu'a paru cette note l'on s'est aperçu que ma situation était tout à fait irrégulière, et l'on est en train de s'occuper de moi. 1. Je ne devrais pas être aux armées sans avoir fait de demande spéciale, personne ne sait comment je suis venu. 2. On ignore si je suis au premier groupe d'aèrostiers ou au 2° groupe d'aviation. C'est au bout de 18 mois que l'on s'aperçoit de cela. Bref, j'ai du raconter au Commandant de l'Aéronautique sur sa demande, comment s'est fait mon engagement, comment je suis parti au Bourget et ensuite aux armées. J'ai demandé également mon maintien dans mon poste, et il est certain que j'y resterai, car tout le monde est fort aimable pour moi, tout ceci ne sont que des formalités à remplir, et tout ira pour le mieux."

* Lettre du 31 mars 1917 : "Vous devez trouver mes lettres bien brèves et peu fréquentes en ce moment, mais je vous ai donné la raison de ce silence ; aujourd'hui on nous a envoyé deux hommes qui vont m'aider cela ne fera pas de mal car je commençais à en avoir trop pour moi seul. Depuis hier il fait un vent effroyable, nous avons eu notre toit enlevé et porté à 30 mètres de notre cagna, de sorte que nous avons passé notre dernière nuit à la belle étoile, ou plutot sous une pluie diluvienne. Aujourd'hui nous avons eu fort à faire pour réparer notre malheur, mais de nouveau le vent s'élève et j'ai peur que notre couvercle ne parte encore une fois, j'espère que cette nuit nous serons tranquilles. Je suis enchanté que vous soyez en relations avec William Laparra. J'aurai grand plaisir à le voir en permission, mais c'est encore bien tôt pour parler de cela.... d'ailleurs les évènements peuvent se précipiter, espérons-le."

* Lettre du 11 avril 1917 : "Quel temps épouvantable pour les pauvres poilus anglais et français, il serait à souhaiter que le beau soleil revienne, et que le vent baisse un peu, nous avons de fortes rafales de neige, ce qui n'est guère de saison. Je m'entends très bien avec mes nouveaux camarades, deux jeunes gens, auxiliaires, et un poilu de la classe 93, jeune de caractère. Le soir nous cherchons des sujets de discussion et passons ainsi de longues soirées, et d'une façon profitable, nos sujets sont très divers ce qui permet à tout le monde de prendre part à la conversation, cela nous sort un peu des immombrables calculs que nous faisons dans la journée et ne m'empêche pas d'amuser mes camarades en leur faisant des tours ; hier j'ai passé la soirée au refectoire des s/off qui s'amusaient comme des fous, malgré tout cela je trouve encore le temps de me remettre aux math. Je crois n'avoir jamais autant travaillé que maintenant. …Hier j'ai été faire une petite ballade aux environs et je me suis aperçu que la chasse s'annonçait très bien, il y a beaucoup de perdreaux, ce qui n'est pas à dédaigner. Flic les lève très bien, il est aussi de plus en plus fort pour les rats, il compte déjà au moins 200 victimes, il faut dire que ces animaux ne sont pas rares chez nous."

* Lettre du Sgt Lussigny, en date du 18 avril 1917 : "Ne croyez pas mon cher ami que je vous ai totalement oublié au contraire, et la preuve en est que je vous écris. Depuis une huitaine de jours, nous avons eu beaucoup de travail et les petits ballons s'envolaient toute la journée précédant de peu les obus qui réduisaient en bouillie les boches et leurs abris. Pourtant pas de sondage de nuit car les gros canons ne tirent pas la nuit : danger du repérage par les lueurs… Or donc, nous avons préparé l'offensive en arrosant avec frénésie les lignes boches. Et les autres groupes faisaient de même. C’était un vacarme effrayant.

Que devenez-vous là-bas et quel temps avez-vous ? Les jours sans caoutchouc sont-ils rares ? Peut-être moins qu’ici en temps ordinaire. Car on ne doit tirer que par beau temps et on ne tire pas chaque fois qu’il fait beau, puis il y a les repos, la réparation des pièces etc. Du 15 décembre au 6 avril, le groupe n’avait pas tiré un seul coup de canon. Chômage complet.

Mais maintenant par l’affreux temps que nous avons depuis plusieurs jours, rendant tous réglages par avion impossible, les groupes de 32 tirent à qui mieux mieux sur les routes les retranchements boches très en arrière et ils en tuent certainement. Ce qui est fort bien. En démolissant leurs redoutes ce qui est mieux. Car nos pruneaux pèsent près de 400 kg et jusqu’à 20 km vont avec précision chercher le but indiqué.

Sur la position de tir, on a installé une petite baraque avec tout ce qu’il faut pour écrire et un poêle pour se chauffer. Nous faisons les sondages de 500 en 500 m, c’est donc tout ce qu ’il y a de tranquille. Je sers mes sondages tout chauds à notre groupe et à un train blindé (six pièces de Marine) qui tire de près de nous et par-dessus de nous en ébranlant ma baraque et mon baromètre. Notre cantonnement roulant se compose de wagons aménagés (nous sommes quatre sous-off dans un wagon) dans lesquels nous avons tous le confortable possible. Y compris un poêle avec beaucoup plus de 8 kg de charbon par jour. Tels la tortue, nous ne bougeons pas sans notre maison. Pas de tente à emporter ! Et nous couchons toujours dans un vrai lit !

Malgré tout je vous regrette quelque peu et même un peu plus ainsi que tous les anciens avec qui j'ai passé plus d'un an en exil au secteur huit. À quand la vie civile ? Que devenez-vous, avez-vous passé la visite ? Écrivez-moi les petits potins de là -bas. Amitiés à Borie au poste et aux sous off de la saucisse bien à vous."

* Lettre à son père, le 10 mai 1917 : "J'ai trouvé ta lettre ce matin en revenant de S...... où j'avais été hier; depuis quelques jours, je me sens un peu fatigué, et j'ai désiré demander l'avis d'un médecin, ne croyez pas pour cela que je sois malade, mais je crois préférable de me reposer un peu et le major m'y engage sans attendre d'être souffrant ; le médecin donc a été très gentil, et pense me faire avoir trois semaines de convalescence, j'attends encore quelques jours pour me faire évacuer car je suis obligé de passer par un hôpital, pour avoir ces 21 jours de repos, ne serait-ce que quelques heures. Je ferai mon possible pour que cet hôpital soit celui où est Madame Lumière, c'est quelque chose de connaître quelqu'un. Je regrette un peu de vous écrire tout cela, je sais que vous allez vous en faire, pourtant, je vous affirme qu'il n'y a pas de quoi se tracasser. Ce qui m'ennuie c'est de quitter camarades et poste où j'étais très bien, mais j'ai la certitude d'y revenir une fois reposé, quant à vous, j'espère que vous serez satisfaits. A part ceci, rien de sensationnel sinon que j'ai fait la connaissance d'Hallo* le peintre de talent, ami des B.n...t de Chantilly, c'est un charmant homme plein d'entrain, tout ce qu'il y a d'anticafard. J'ai reçu aujourd'hui une lettre de Jean m'annonçant son retour aux tranchées, dans un pays minier me dit-il, je suppose qu'il connaît déjà le secteur. Il a rencontré en montant en lignes le frère de Monsieur Méry, capitaine dans un état major. Je vous écrirai probablement encore avant de quitter mon poste, continuez toujours à m'écrire à la 38ème compagnie car si je tarde à me faire évacuer je resterai sans nouvelles. Au revoir mon cher Père à bientôt donc j'espère, en attendant je vous embrasse tous de coeur."

* Hallo : Observateur-photographe. Apprentissage au centre de Chalais-Meudon, puis premières missions dans la région de Verdun. Il est alors l'un des pionniers de la photographie aérienne. Puis célèbre affichiste. En 1934, il est nommé Conservateur du Musée de Senlis qu'il transforme en Musée de la vénerie.

Réformé n° 2 et fin de guerre :

Sa coxalgie de la jambe droite se rappelle à son bon souvenir avec un réveil inflammatoire très douloureux. Il est d'abord évacué sur l'hôpital de Bar-le-Duc (Meuse) du 13 mai au 23 mai 1917, puis passe plusieurs mois à l'hôpital des jockeys de Chantilly, où demeuraient ses parents. Il est déclaré "réformé n° 2" par la commission de réforme de Compiègne, le 21 septembre 1917. Il n'est désormais plus apte à aucun service militaire, y compris dans les unités de soutien des forces. Il emménage temporairement chez M. Henri Vicaire, son oncle, notaire à Ambérieu (Ain), à compter du 19 juin 1918. Henri Vicaire sera maire de la ville d'Ambérieu (Ain). Après la fin de la guerre, il est décoré de la médaille commémorative de la Grande Guerre, de la médaille interalliée.

Diplômé des Beaux-Arts :

Il reprend ses études interrompues par la guerre et est diplômé des Beaux-Arts de Paris. Il expose au salon des artistes français et remporte le prix Chavanard qui lui permet d'effectuer son premier voyage au Maroc. Il en revient avec son carnet de croquis qui sera publié sous le titre "Feuilles d'Album, au Maroc" en 1922.

Affectation au Maroc :

Grâce à un prix de la compagnie maritime Paquet, il peut effectuer un second voyage au Maroc et séjourne à Fès au sein des ateliers d'artistes, créés par le Maréchal Lyautey. En janvier 1923, le Maréchal Lyautey le nomme conservateur du musée du Batha.

Il est nommé sous-inspecteur régional des Arts Indigènes, le 1er juin 1923, puis affecté à l'inspection régionale de Rabat et chargé de la conservation du musée des Oudayas, du contrôle du cabinet de dessin, du contrôle des ateliers d'état.

Comme Inspecteur des arts indigènes, il est nommé inspecteur des Beaux-arts et monuments historiques à Fez (Maroc) en 1924.

Exemple de gouache sur papier réalisée par Marcel Vicaire - Photo droits réservés.

Son mariage avec Lucile Henry :

Il se marie avec Mlle Lucile Marie Edmonde Henry à la Chapelle-en-Serval (Oise), le 27 septembre 1927. Le couple s'installe en pleine médina de Fès, au Dar Adiyel. Ils auront cinq filles, Myriam (1928), Dominique, Marie-Marthe, Isabelle, Solange.

En 1932, il fonde l'Association des amis de Fès pour protéger et faire connaitre le patrimoine de la ville.

La seconde guerre mondiale :

Agé de 46 ans, il passe dans la classe de mobilisation le plus ancienne, le 8 novembre 1939. Il est dégagé de ses obligations militaires, le 15 octobre 1941.

Retrouve le Maroc :

Il est affecté à Rabat en 1945 et nommé chef du service des Arts et Métiers marocains, le 1er août 1946. A l'Indépendance du Maroc, il est affecté au ministère marocain de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Il est nommé officier du Ouissam Alaouite au Maroc et officier du Nicham Iftikhar en Tunisie.

Nominé au grade de Chevalier de la Légion d'Honneur :

Il est nommé Chevalier de la Légion d'Honneur en 1955 et rentre en France en 1958, il a alors 65 ans. Il prend sa retraite comme conservateur en chef des musées nationaux honoraire. Il est décédé à Saint-Etienne (Loire), le 26 novembre 1976.

Sources :

Sources : Acte de naissance n° 1158 du registre des naissances de la mairie du 16ème arrondissement de Paris - Fiche matricule conservée aux archives départementales de l'Oise - CCC de l'escadrille MF 63 - CCC de l'escadrille N 23 - CCC de la 38ème compagnie d'aérostiers - Carrière civile sur Wikipedia - Revue France-Maroc - Site internet de l'amicale des anciens de Fès.

Dernière mise à jour :

Le 13 mai 2021.

 

Remerciements à :

- Mme Isabelle Crouïgneau-Vicaire pour la communication des archives de Marcel Vicaire, son père.

Bibliographie :

- Les escadrilles de l'aéronautique militaire française - Symbolique et histoire - 1912-1920 - Ouvrage collectif publié par le SHAA de Vincennes en 2003.
- The French Air Service War Chronology 1914-1918 par Frank W.Bailey et Christophe Cony publié par les éditions Grub Street en 2001.
- Le Journal Officiel de la République Française mis en ligne sur le site "Gallica" de la Grande Bibliothèque de France.
- Carnets de Comptabilité en Campagne des escadrilles mis en ligne par le Site "Mémoire des Hommes."
- Les "As" français de la Grande Guerre en deux tomes par Daniel Porret publié par le SHAA en 1983.
- Les Armées françaises dans la Grande Guerre publié à partir de 1922 par le Ministère de la Guerre.
- Site Internet "Mémoires des Hommes" du Ministère de la Défense - Voir le lien
- Site Internet "Météo France" -
Les instruments anciens en image - Voir ce lien
- Site Internet " Pages 14-18 "
de Joël Huret.

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Frères Chambaz Joannes Clausier

 

 

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